Une profession libérale peut être exercée soit sous forme d’entreprise individuelle soit sous forme de société. Pour l’exercice d’une activité libérale en société, il existe des particularités en fonction de la nature réglementée ou non de la profession.

I. Le choix de l’entreprise individuelle

Il s’agit d’une formule minimaliste qui peut être adaptée pour une activité individuelle sans objectif de développement.

Sur le plan fiscal, les bénéfices des professionnels libéraux sont en principe soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).

Ils sont soumis :

– soit au régime de la micro-entreprise Dans ce cas, en principe, l’impôt sur le revenu est calculé en appliquant au bénéfice forfaitaire le barème progressif par tranches.

– soit au régime de la déclaration contrôlée, sur option ou si leurs recettes annuelles de l’année précédente excédent 70 000 euros. (33 100 € antérieurement à l’adoption de la loi de finances pour 2018)

Dans ce cas, leur bénéfice imposable est déterminé en prenant en considération les recettes effectivement encaissées pendant l’année et les dépenses effectivement payées pendant cette même année.

Ils peuvent également opter pour l’impôt sur les sociétés (IS) s’ils choisissent d’exercer leur activité sous le régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.

Sur le plan social ces professionnels entrent dans la catégorie des travailleurs non-salariés et doivent donc s’affilier obligatoirement :

  • à l’Urssaf (allocations familiales) ;
  • au régime social des indépendants (SSI) (assurance maladie-maternité) ;
  • à la caisse d’assurance vieillesse correspondant à leur profession.

Les charges sociales sont calculées sur la base du bénéfice de l’entreprise.

II. Le choix de l’exercice d’une profession libérale en société

Pour les professions libérales non réglementées, toutes les formes de société peuvent être retenues : EURL, SARL, SA, SAS…

Pour les professions libérales réglementées, en fonction de l’activité exercée, il est possible de recourir à des sociétés commerciales et / ou à des sociétés particulières, telles que la SCP et la SEL.

Le recours à ces sociétés spécifiques n’est possible que pour certaines activités libérales réglementées, dont la liste est fixée par décret.

La SCP permet à plusieurs membres d’une même profession libérale réglementée d’exercer en commun leur activité. Elle est transparente fiscalement, chaque associé est personnellement imposé sur sa part de bénéfices au titre des BNC. Une option irrévocable pour l’IS est possible.

La société d’exercice libéral (SEL) permet aux membres de certaines professions libérales réglementées d’exercer leur activité sous forme de sociétés de capitaux.

Elle prend une des formes suivantes :

SARL : SELARL (société d’exercice libéral à responsabilité limitée) ;

SA : SELAFA (société d’exercice libéral à forme anonyme) ;

SAS : SELAS (société d’exercice libéral par actions simplifiée) ;

SCA : SELCA (société d’exercice libéral en commandite par actions).

Au niveau fiscal et social le régime est identique à celui des sociétés de capitaux classiques (SARL, SA, SAS)

III. La transformation de l’entreprise individuelle en société

La transformation d’une entreprise individuelle en société, conduit en principe à la liquidation fiscale de cette dernière et conduit donc à la taxation des plus-values professionnelles, alors même qu’aucun flux financier ne sera enregistré dans cette opération de pure restructuration juridique.

Le législateur a depuis 1982 proposé une solution à cette problématique en adoptant le texte de l’article 151 octies du CGI.

Ce régime dérogatoire est susceptible de bénéficier à toutes les personnes physiques qui apportent à une société une entreprise individuelle ou une branche complète d’activité, quels que soient la nature (industrielle, commerciale, artisanale, non commerciale ou agricole) et le régime d’imposition de l’entreprise concernée.

La forme de la société bénéficiaire de l’apport est indifférente, de même que son régime fiscal (impôt sur les sociétés ou impôt sur le revenu). Il convient toutefois de souligner que la société doit relever d’un régime réel d’imposition à la date de l’apport.

L’apport doit en principe porter sur la totalité d’une entreprise individuelle ou sur une branche d’activité. Les immeubles affectés à l’exploitation peuvent être exclus de l’apport, à condition d’être mis à la disposition de la société dans le cadre d’un bail d’une durée minimale de neuf ans.

L’option pour le régime spécial permet à l’apporteur de bénéficier d’un report d’imposition pour les plus-values constatées sur les immobilisations non amortissables. L’impôt sur les plus-values sur immobilisations amortissables et les profits sur stocks, est transféré à la société bénéficiaire de l’apport.

Ainsi l’imposition des plus-values, à court terme ou à long terme, sur éléments non amortissables est reportée jusqu’à la cession (vente, apport en société, échange…) des droits sociaux reçus en rémunération de l’apport, le rachat ou l’annulation de ces droits par la société ou la cession par la société des biens concernés.

En cas de perte du report d’imposition, les plus-values deviennent imposables au nom de l’apporteur au titre de l’année au cours de laquelle l’événement intervient et d’après les barèmes et taux en vigueur à cette date.

Le report d’imposition est maintenu en cas de transmission à titre gratuit de la pleine propriété ou de la nue-propriété des droits sociaux rémunérant l’apport, ou en cas de donation-partage avec soulte si le bénéficiaire s’engage à acquitter l’impôt afférent à la plus-value.

L’apporteur et la société doivent, conjointement, exercer l’option pour le régime dérogatoire dans l’acte d’apport ou de constitution de la société. A défaut, la plus-value est immédiatement taxable.

L’apporteur doit avertir l’administration de la cession de son entreprise dans un délai de 45 jours décompté à partir de sa réalisation puis souscrit la déclaration des résultats de l’exercice clos par l’apport dans un délai de 60 jours à compter de la même date.

Un état de suivi des plus-values en report d’imposition relatif aux éléments amortissables et non amortissables apportés et aux titres reçus en rémunération des apports est joint à cette déclaration.

L’apporteur doit par ailleurs joindre à sa déclaration de revenus de l’année de réalisation de l’opération et des années ultérieures un état (conforme à un modèle fourni par l’administration) destiné à assurer le suivi des plus-values sur éléments non amortissables dont l’imposition est reportée.

La société bénéficiaire de l’apport doit quant à elle, d’une part, joindre à ses déclarations de résultats un état de suivi des plus-values non imposées lors de l’apport, d’autre part, tenir un registre relatif aux plus-values sur éléments non amortissables.

Le non-respect des obligations relatives à l’état de suivi ou au registre des plus-values entraîne l’exigibilité d’une amende fixée à 5 % des sommes omises (CGI art. 1763).

Dans la pratique, la gestion dans le temps de ce report d’imposition pose des difficultés aux praticiens.

Dans le cadre de la réalisation d’un bilan patrimonial, l’existence de ce report doit être identifiée afin de chiffrer le passif fiscal latent. Lors des opérations de transmissions à titre onéreux (en cas de départ à la retraite) et à titre gratuit, les conséquences fiscales doivent être clairement identifiées. Des pistes d’optimisation étant offertes.

IV. Les sociétés pluri-professionnelles d’exercice des professions du droit et du chiffre

La loi du 6 août 2015 (Loi Macron) a rendu possible la création de sociétés pluri-professionnelles qui ont pour objet l’exercice en commun, au sein d’une même structure, de plusieurs professions réglementées du droit et du chiffre : avocat, avocat au Conseil d`Etat et à la Cour de cassation, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, notaire, administrateur et mandataire judiciaires, conseil en propriété industrielle et expert-comptable.

Ces sociétés peuvent se constituer sous forme de SARL, société par actions simplifiée (SAS), société anonyme (SA) ou société civile.

Un récent décret du 5 mai 2017 (entré en vigueur le 8 mai 2017) vient de fixer, notamment :
– les règles relatives à leur constitution, fonctionnement, contrôle et la liquidation,
– certaines modalités d’exercice de l’activité des professionnels au sein de la société pluri-professionnelle,
– des règles comptables et des règles à respecter vis-à-vis des autorités et des ordres professionnels et la portée de l’obligation d’assurance

Le choix d’une mode d’exercice est donc délicat. Il convient pour chaque situation d’analyser les conséquences en matière juridique et fiscale et sur le terrain de la rémunération et de la protection sociale.

Le bon choix ne pourra résulter que d’une synthèse exhaustive.