Analyse par STEPHANE PILLEYRE

 

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La loi de finances pour 2013 a modifié, à compter du 1er janvier 2013, le régime d’imposition des revenus de capitaux mobiliers (RCM). Ces derniers sont désormais obligatoirement intégrés dans le revenu net global imposable et soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu.

 

Lors de l’encaissement de ces revenus de capitaux mobiliers, un acompte au titre de l’impôt sur le revenu est exigible, par le biais de l’application d’un prélèvement à la source. Le taux de ce dernier est fixé à 24% pour les RCM fixes et à 21% pour les RCM variables.

 

La possibilité de demander la dispense de cet acompte est offerte à certains contribuables (sous condition de ressources) qui en font la demande au plus tard le 30 novembre de l’année précédant la perception desdits revenus.

 

Ces mesures législatives ont fait l’objet de commentaires de la part de Bercy dans le cadre d’une mise à jour du BOFiP publiée le 11 février 2014.

 

Cette publication est très riche…

 

Les commentaires sur lesquels nous souhaitons nous attarder dans cette présente lettre portent sur la gestion de l’acompte et de son éventuelle dispense dans le cadre d’une société de personnes (et plus particulièrement d’une société civile)

 

Le BOFiP comporte aussi de nombreuses informations qui concernent les modalités de détermination de la base de l’acompte. Ces dernières seront commentées dans une prochaine newsletter.

 

A. L’acompte s’applique y compris aux RCM perçus via une société de personnes

 

Le paragraphe 260 du BOI-RPPM-RCM-30-20-10 précise :

« [NDLA : l’acompte de 21%] sur les revenus distribués concerne les contribuables, personnes physiques domiciliées fiscalement en France au sens de l’article 4 B du CGI, qui bénéficient de revenus distribués dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé :

 – soit directement ;

 – soit dans le cadre d’une indivision ;

 – soit par l’intermédiaire d’une société de personnes exerçant une activité civile (par exemple, une société civile de portefeuille) et dont les associés sont imposés dans les conditions de l’article 8 du CGI. »

 

Ainsi l’acompte est dû sur l’ensemble des revenus de capitaux mobiliers notamment sur ceux perçus par le biais d’une société civile. Celle-ci peut en effet, encaisser des intérêts de livrets et comptes rémunérés à son nom ou bien des coupons d’obligations et des dividendes d’actions issus d’un compte titres inscrit au bilan de celle-ci.

 

Cette précision semble tout à fait logique en raison de la translucidité fiscale des sociétés de personnes, parmi lesquelles figurent les sociétés civiles.

 

B. La société civile constitue désormais un établissement payeur

 

Dans le paragraphe 15 du BOI-RPPM-30-20-20, il nous est précisé :

« L’acompte d’impôt sur le revenu prélevé à la source sur les produits de source européenne visés au I de l’article 125 A du CGI est opéré par l’établissement payeur français (CGI, ann. II, art. 75), qui est en pratique le gestionnaire du compte du contribuable qui perçoit les revenus de source européenne.

 

Les règles détaillées ci-dessous s’appliquent également à l’acompte d’impôt sur le revenu prévu au I de l’article 117 quater du CGI. »

 

Or, il est mentionné dans le paragraphe 20 du BOI-RPPM-30-20-20 :

« […] la qualité d’établissement payeur doit être reconnue :

 – aux intermédiaires qui procèdent au paiement de coupons et instruments analogues ou qui accomplissent des opérations assimilables à un tel paiement ;

 – aux intermédiaires qui paient, à quelque titre que ce soit, des revenus de capitaux mobiliers non représentés par des coupons. Tel est le cas notamment des notaires qui paient des revenus de créances dans le cadre de leurs attributions professionnelles ;

 – aux personnes et collectivités qui paient, soit directement, soit avec le concours d’un intermédiaire situé hors de France, des revenus de capitaux mobiliers dont elles sont personnellement débitrices ;

 – aux gérants des fonds communs de placement ;

 – aux sociétés de personnes et assimilées visées à l’article 8 du CGI, pour les revenus de capitaux mobiliers qu’elles encaissent. »

 

 

Il résulte donc des commentaires doctrinaux que les sociétés de personnes doivent être considérées comme des établissements payeur en charge de collecter l’acompte sur les revenus de capitaux mobiliers.

 

Berçy nous apporte toutefois une précision dans le paragraphe suivant (n°25) :

« Les sociétés de personnes et assimilées visées à l’article 8 du CGI ne sont assujetties aux obligations qui incombent aux établissements payeurs en matière de prélèvement sur les produits de placements à revenu fixe, que si elles exercent une activité purement civile.

Dans l’hypothèse où elles n’exercent pas seulement une activité purement civile, ces entreprises sont réputées avoir la qualité de bénéficiaire final et non celle d’établissement payeur.

 Si une société n’ayant pas un caractère purement civil encaisse des revenus d’obligations qui ont supporté la retenue à la source, elle conserve toutefois la qualité d’établissement payeur pour la délivrance à ses associés des certificats de crédit d’impôt correspondants. »

 

Ce paragraphe est d’une grande importance puisqu’il nous est expliqué que la société civile ayant une activité purement civile est tenue de respecter les obligations qui lui incombent en tant qu’établissement payeur.

Il est à noter que si la société n’a pas une activité purement civile, elle sera toutefois tenue de délivrer les certificats de crédits d’impôts à ses associés.

A titre d’exemple, les activités purement civiles consistent en la :

– perception de revenus imposés dans la catégorie des revenus fonciers ou des revenus de capitaux mobiliers ;

– réalisation de plus-values sur valeurs mobilières ou de plus-values immobilières des particuliers.

 

C. Par conséquent, la société civile est tenue de déclarer et verser l’acompte mais également de réaliser l’IFU

 

Il résulte donc de ces commentaires doctrinaux que les banques doivent depuis le 11 février 2014 verser les revenus de capitaux mobiliers pour leur montant brut. Les RCM perçus, doivent être encaissés pour leur montant brut (l’établissement bancaire est déchargé de la perception de l’acompte), la déclaration et le versement de l’acompte doivent être pris en charge par la société civile.

 

1. Réalisation de la déclaration et paiement de l’acompte dans un délai précis

 

L’administration fiscale nous précise au paragraphe 10 du BOI-RPPM-RCM-30-20-50 :

« Le prélèvement dû sur les revenus distribués et les prélèvements sociaux y afférents sont versés au Trésor dans les quinze premiers jours du mois qui suit celui du paiement des revenus (CGI, art. 1671 C). »

 

Ainsi, tous les RCM, encaissés par une société civile (ayant une activité purement civile) à compter du 11 février 2014,  auraient dû être crédités pour le montant brut, l’acompte et les prélèvements sociaux devant être déclarés et versés au plus tard le 15 mars.

L’acompte et les prélèvements sociaux des RCM encaissés courant mars auraient dû être déclarés et versés au plus tard le 15 avril

 

2. Rédaction d’une déclaration spécifique 2777-D ou 2777

 

Le paragraphe 90 du BOI-RPPM-RCM-30-20-50 ajoute :

« La déclaration et le paiement du prélèvement forfaitaire et des prélèvements sociaux correspondants sont effectués […] :

 – au service des impôts des entreprises auprès duquel l’établissement payeur dépose sa déclaration de résultat ou, à défaut d’une telle déclaration (par exemple, pour les sociétés civiles de portefeuille relevant de l’article 8 du CGI), au service des impôts des entreprises dont relève son siège social, lorsque cet établissement payeur est, à la date du paiement du prélèvement forfaitaire, uniquement redevable de ce prélèvement et/ou des prélèvements sociaux sur des revenus distribués. Dans cette situation, l’établissement payeur dépose une déclaration dite « simplifiée » n° 2777-D (CERFA n° 13685).

 – à la recette principale des impôts des non-résidents de la direction des résidents à l’étranger et des services généraux (DRESG), sise 10 rue du Centre – TSA 50014 – 93465 NOISY LE GRAND CEDEX, à l’appui d’une déclaration n° 2777 (CERFA n° 10024) , dans les autres cas. »

 

Dans la majeure partie ces cas, le gérant doit réaliser pour le compte de la société civile la déclaration n°2777-D et l’envoyer au service des impôts des entreprises dont il dépend (le même que celui à qui il envoie chaque année la déclaration de revenu n°2072).

 

Ce formulaire et sa notice sont disponibles via le lien suivant : 2777-D et 2777-D-NOT.

 

3. La responsabilité de la société civile donc du gérant est engagée

 

Bercy termine les modalités de déclaration et de paiement de l’acompte par un paragraphe pour le moins explicite BOI-RPPM-RCM-30-20-50 §70 al. 2 :

« L’établissement payeur des revenus distribués opère, sous sa propre responsabilité, le prélèvement forfaitaire, et procède à la déclaration et au paiement de ce prélèvement »

 

4. Réalisation de l’IFU

 

Enfin, le paragraphe 450 du BOI-RPPM-RCM-30-20-50 rappelle :

« Pour les revenus distribués soumis au prélèvement forfaitaire (en l’absence de dépôt de la demande de dispense prévue par l’article 117 quater du CGI et l’article 242 quater du CGI), les établissements payeurs de ces revenus établis en France mentionnent, sur la déclaration annuelle récapitulative des  revenus de capitaux mobiliers (dénommée « imprimé fiscal unique » ou « IFU »), le montant des revenus distribués qui ont été soumis au prélèvement forfaitaire et le montant de ce prélèvement (CGI, art. 242 ter du CGI et CGI, ann. III, art. 49 F).

 En outre, ces établissements payeurs sont tenus de produire à la demande de l’administration fiscale tout document justifiant du montant des revenus distribués soumis au prélèvement forfaitaire et du montant du prélèvement qui a été opéré. »

 

L’administration fiscale rappelle donc que l’établissement payeur, ici la société civile ayant une activité purement civile, doit tenir à disposition tous les justificatifs ayant trait aux RCM distribués et à l’acompte qui a été réalisé. Cette charge incombe concrètement au gérant de la société civile (et non plus à l’établissement bancaire).

 

D. A défaut de déclaration et paiement dans les délais des sanctions sont prévues

 

Bercy précise les sanctions applicables en cas de défaut ou de retard s’agissant de la déclaration et du paiement de l’acompte.

 

Ainsi, on peut lire aux paragraphes 200 et suivant du BOI-RPPM-RCM-30-20-50:

« Le retard dans le paiement du prélèvement forfaitaire et des prélèvements sociaux correspondants donne lieu au versement :

 – de l’intérêt de retard au taux de 0,4 % par mois de retard (CGI, art. 1727) ;

 – et d’une majoration de 5 % du paiement des sommes dont le versement a été différé (CGI, art. 1731). »

 

Le défaut de déclaration ou son dépôt tardif donnent lieu au versement :

 – de l’intérêt de retard au taux de 0,4 % par mois de retard, calculé sur le montant des droits dus par le redevable (CGI, art. 1727) ;

 – et d’une majoration de 10 % calculée sur le montant des droits dus, portée à 40 % lorsque la déclaration n’a pas été déposée dans les 30 jours de la réception d’une mise en demeure (CGI, art. 1728).

 Le dépôt tardif de la déclaration non accompagné du paiement de la totalité des droits correspondants donne lieu à l’application cumulative de l’ensemble des pénalités indiquées ci-dessus. »

Il s’agit là des sanctions classiques applicables à l‘impôt sur le revenu d’une manière générale. Il conviendra de rappeler que ces sanctions vont porter sur les épaules du gérant….

 

E. Au-delà de la déclaration et du paiement de l’acompte, le gérant doit aussi centraliser les demandes de dispense…

 

Pour terminer, le gérant de la société civile (établissement payeur) devra gérer les demandes de dispense d’acompte pour les associés répondant aux conditions imposées par la loi.

(Les modalités de dispense des acomptes seront développées plus en détail lors d’une prochaine newsletter)

 

 

 

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