CONTROLE FISCALA la veille des dates de déclarations des revenus et du patrimoine (en vue de l’imposition à l’ISF), les contribuables risquent d’être confrontés à des incertitudes quant à l’application de règles fiscales, notamment issues des dernières lois de finances. L’analyse des textes, de plus en plus nombreux, de plus en plus complexes, risque d’être divergente sur certains point entre les redevables de l’impôt et le fisc. Ce dernier a sur la dernière période était peu prolixe en matière de commentaires administratifs. Le BOFiP est à ce jour quasiment muet en ce qui concerne les mesures adoptées fin 2012 et impactant l’impôt sur le revenu et l’impôt de solidarité sur la fortune.

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Une erreur d’analyse ou d’application conduira a posteriori à un redressement fiscal. Ce dernier sera normalement assorti d’un intérêt de retard au taux de 0,40% par mois prévu à l’article 1727 du CGI. L’intérêt de retard a pour objet de compenser forfaitairement le préjudice financier subi par le Trésor du fait de l’encaissement tardif de sa créance.

« toute créance de nature fiscale, dont l’établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n’a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d’un intérêt de retard. A cet intérêt s’ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code ».

Le CGI, écarte cependant, l’application des intérêts de retard en cas de présence d’une mention expresse. (2 bis du II de l’article 1727 du CGI)

De quoi s’agit-il ?

Voici la définition fournie par Bercy (BOI-CF-INF-10-10-10-20120912)

L’intérêt de retard n’est pas applicable lorsque le contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l’acte, ou dans une note annexée, les motifs de droit ou de fait qui le conduisent à ne pas mentionner en totalité ou en partie, certains éléments d’imposition, ou à leur donner une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou à faire état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées.

La non application des intérêts de retard applicable en raison d’une « mention expresse » est susceptible de concerner toutes les déclarations ou actes comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt, quelle que soit l’imposition en cause.

Quelles sont les conditions de forme à respecter ?

Pour être dispensé du paiement de l’intérêt de retard, le contribuable doit avoir porté une mention expresse dans le corps même de la déclaration ou de l’acte ou dans une note annexée à ces documents.

Dans le cas où un contribuable a adressé à l’administration une demande de renseignements qui est restée sans réponse au moment où il doit prendre position dans une déclaration ou dans un acte, il est admis que la copie de la demande qu’il joint à la déclaration ou à l’acte soit considérée comme valant mention expresse.

L’administration précise que  cette interprétation souple ne saurait être détournée de son objet et être abusivement utilisée pour échapper indûment à l’impôt. Elle ne saurait donc être utilement invoquée dans les cas, par exemple, d’une demande d’application d’un régime manifestement contraire aux textes ou pour laquelle le contribuable aurait déjà reçu une réponse de l’administration.

Quelles sont les conditions de fonds à respecter ?

En outre, le contribuable doit avoir indiqué les motifs de droit ou de fait pour lesquels il estime les éléments en cause non imposables ou déductibles.

Par motifs de droit ou de fait, il y a lieu d’entendre un énoncé des raisons pour lesquelles le contribuable a cru pouvoir retenir la position dont il fait état ou la solution dont il demande le bénéfice.

Pour que ces motifs puissent être admis, ils ne doivent présenter aucune équivoque et doivent mettre l’administration en mesure d’apprécier s’il est possible d’admettre les explications du contribuable ou s’il convient au contraire de rectifier la situation litigieuse.

Cas particulier d’application de la mention expresse lorsque l’administration n’a pas publié ses commentaires.

Afin de ne pas pénaliser les contribuables de bonne foi qui ne disposent pas, à l’expiration du délai de dépôt de leur déclaration, de tous les éléments d’interprétation nécessaires pour remplir leurs obligations déclaratives, le législateur a étendu depuis le 1er janvier 2009, le dispositif dit de la « mention expresse ».

La loi de finances rectificative pour 2008 a subordonnée l’application de la mention expresse aux six conditions suivantes.

1.       Le contribuable doit être de bonne foi.

L’exonération des intérêts de retard est réservée aux contribuables de bonne foi.

Ainsi, la demande ne doit pas envisager une solution manifestement contraire au texte en cause ou porter sur un point qui ne présente manifestement aucune difficulté. Tel sera le cas, par exemple, lorsque la disposition fiscale en cause comporte en elle-même la précision demandée.

De même, la demande ne doit pas porter sur un sujet sur lequel l’administration a déjà pris position à l’occasion d’une précédente demande du contribuable.

La bonne foi est présumée. Dès lors, l’administration doit établir l’absence de bonne foi du contribuable pour faire échec à l’application de l’exonération pour mention expresse.

2.       La déclaration doit être souscrites dans les délais prescrits

L’exonération des intérêts de retard n’est susceptible de s’appliquer qu’aux rehaussements apportés à une déclaration souscrite dans les délais.

3.       Il doit exister une difficulté qui touche au principe ou aux modalités de la déclaration de certains éléments d’imposition

La loi vise à faire en sorte que les contribuables ne soient pas pénalisés par les difficultés qu’ils rencontrent à déterminer la portée d’une disposition sur laquelle ils n’ont pas pu disposer en temps utile des éclaircissements nécessaires de la part de l’administration.

Les difficultés rencontrées peuvent porter :

– soit sur le principe de la déclaration : telle somme est-elle imposable ou est-elle déductible ?

– soit sur les modalités de déclaration : dans quelle rubrique ou sous quel régime d’imposition doit être déclaré tel élément ?

Pour ouvrir droit à l’exonération d’intérêt de retard, la difficulté évoquée ne doit pas avoir donné lieu à des commentaires publiés par l’administration.

Les difficultés rencontrées doivent porter, soit sur l’interprétation d’une disposition fiscale nouvelle, soit sur la détermination des incidences fiscales d’une règle comptable.

a° Difficulté d’interprétation d’une disposition fiscale nouvelle

Par disposition, il faut entendre disposition législative ou réglementaire.

La disposition qui suscite la difficulté d’interprétation doit être fiscale, c’est-à-dire porter sur l’assiette de l’impôt : base, taux, réduction d’impôt, crédit d’impôt…

Sont exclues à ce titre les dispositions de nature non fiscale qui auraient une incidence sur des dispositifs fiscaux mais dont l’interprétation ne relève pas de la compétence de l’administration fiscale (réglementation relative à l’urbanisme par exemple).

La disposition nouvelle s’entend d’une disposition entrée en vigueur au plus tôt le 1er janvier de l’année précédant la date limite de dépôt de la déclaration en cause.

b° Difficulté de détermination des incidences fiscales d’une règle comptable

Les contribuables soumis aux règles comptables qui rencontrent des difficultés à déterminer les incidences fiscales de ces règles peuvent soumettre ces difficultés à l’administration.

L’administration fiscale n’étant pas compétente pour interpréter les règles comptables, la question posée ne doit pas porter sur la règle comptable même mais sur ses incidences fiscales. Ainsi, par exemple, la question ne doit pas porter sur le point de savoir comment une opération donnée doit être traitée sur le plan comptable mais sur le point de savoir comment doit être traitée, sur le plan fiscal, une opération appréhendée d’une façon déterminée sur le plan comptable. La question peut relever de la mention expresse quelle que soit l’ancienneté de la règle comptable en cause.

En revanche, lorsqu’il s’agit d’une disposition fiscale adaptant une règle comptable, la difficulté ne sera susceptible de donner lieu à une mention exonératoire d’intérêt de retard que si la question porte sur une loi fiscale récente, telle que définie au II-B-3-b-3°-a°. Elle devra donc être posée avant l’expiration du délai de dépôt d’une déclaration devant être souscrite avant la fin de l’année suivant celle de l’entrée en vigueur de la mesure.

4.       L’administration fiscale doit être interrogée avant l’expiration du délai de déclaration

Les difficultés rencontrées par le contribuable doivent l’avoir conduit à interroger l’administration par écrit avant l’expiration du délai de déclaration. La demande doit être écrite mais peut être effectuée par la voie postale ou au moyen d’un courrier électronique. Elle doit avoir été adressée au service des impôts gestionnaire du dossier du contribuable (service des impôts des particuliers ou service des impôts des entreprises).

Il suffit que la demande ait été adressée préalablement à la déclaration elle-même. Aucun délai n’est prévu par la loi.

La demande doit être précise et complète : elle doit préciser les éléments de fait nécessaires à sa compréhension, la disposition fiscale ou la règle comptable en cause ainsi que le point précis sur laquelle porte la difficulté d’interprétation motivant la demande.

5.       Obligation de joindre à la déclaration une copie de la demande restée sans réponse

Afin de prévenir toute difficulté qui pourrait notamment résulter de la perte de la copie, il est recommandé au contribuable de porter de façon visible sur la déclaration la mention suivante : « mention expresse, voir lettre jointe en copie ».

En cas de télé-déclaration, le contribuable est dispensé d’adresser au service des impôts une copie de sa demande mais doit faire état de sa volonté de bénéficier du dispositif de la mention expresse, en précisant dans la déclaration effectuée par voie électronique la date de la demande effectuée préalablement et son objet.

S’agissant des déclarations des revenus des particuliers, cette mention est insérée dans la rubrique libre réservée aux commentaires du contribuable destinés à l’administration située en fin de déclaration.

6.       Absence d’une prise de position formelle de la part de l’administration avant l’expiration du délai de déclaration.

L’exonération d’intérêt de retard ne jouera pas si l’administration prend position sur la question posée avant l’expiration du délai de déclaration, soit dans une réponse adressée au contribuable, soit par une publication de la DGFIP. Dans ce dernier cas, l’administration ne sera considérée comme ayant pris formellement pris position sur le point soulevé par le contribuable que si l’instruction évoque précisément ce point. En d’autres termes, le seul fait qu’une instruction fiscale ait été publiée sur la disposition en cause ne privera pas le contribuable de l’exonération d’intérêt de retard si l’instruction n’apporte pas de précision sur la difficulté soulevée par le contribuable dans sa demande.

Conclusion :

Afin de sécuriser les déclarations, il peut donc être opportun, d’interroger au préalable l’administration avant la date de dépôt des déclarations et d’utiliser ensuite, lors de ces dernières la mention expresse.

Déclarations des revenus - Doctrine administrative - Intérêts de retard - Mention expresse -